En théorie…
S’il vous plaît, Hon’Sépa, ne commencez pas comme ça. Un garçon se prend une rouste, de la part de quatre hommes, qui, au prétexte qu’ils ont une tenue de Police, se croient tout permis et vous…
Non, non, non, Gipeurien… Ne prenez pas ma place. L’indécis, ici, c’est moi. Donc, à ce titre je me pose des questions. Et je dis qu’en théorie, les faits parlent d’eux-mêmes, reconnaissant volontiers que rien n’excuse les policiers, mais par ailleurs, je veux aussi savoir ce qu’il s’est réellement passé, car il me semble que de tels comportements ne viennent pas sans raison. Aussi : pourquoi un tel déchaînement de violences, ce qui les a provoquées ? Quelle part appartient à Théo – s’il en a une – quelle part, au ras le bol ressenti par les forces de l’ordre ? Car on voit bien aujourd’hui, qu’un nombre de gamins perdus, n’attendent que de tels événements – vous remarquerez que je ne parle pas d’incidents – pour aussitôt tout casser, brûler et, sans doute, provoquer pour blesser.
Théo paraît avoir eu un comportement honorable en prenant parti pour l’un de ses petits camarades, lors d’un contrôle d’identité, somme toute, banal. Maintenant, un geste, un mot, même involontaires, peuvent avoir des conséquences dramatiques. Et c’est là où je m’interroge sur la place que tient la crainte pour ne pas dire la peur, chez ces hommes en charge de la sécurité publique, dans des quartiers dits, pudiquement, difficiles. On sait ce qu’il peut leur arriver. Je vous rappelle notre écho, sur la page d’accueil du site, en leur faveur. Il est évident que sur ces faits, on n’a pas trop envie de les soutenir. Mais, par pitié, que l’arbre ne cache pas la forêt et, encore une fois, quelle raison a pu déclencher un tel phénomène de haine ? Quelle que sera la réponse apportée, il faudra décortiquer les faits, les exposer, expliquer, tenir compte des conclusions et non faire semblant. Reprendre le film au ralenti et travailler dessus.
Je trouve votre approche équilibrée, mais je me pose tout de même la question de savoir ce que doivent être les positions du politique, du médiatique. Excusez-moi, même si nombre de personnalités de droite comme de gauche – bien sûr – trouvent normal que le Président de la République, se rende au chevet de la victime, sans attendre de savoir si Théo n’a pas fait monter, même sans le vouloir, un peu la température, je trouve la démarche limite. Désolé, mais par les temps qui courent, j’y vois plus un jeu tactique qu’un réel soutien au jeune homme. Le Président déroule ses dernières semaines à l’Elysée, il doit être hanté par l’idée d’avoir à gérer une flambée type 2005, avant de partir. Ensuite, tout ce qui peut renforcer le seul domaine dans lequel il n’aura pas commis d’erreur hurlante, même si les chiffres de la délinquance parlent, il ne va pas se priver de le mettre en valeur. Et sans doute veut-il démontrer au(x) candidat(s) de gauche, qu’elle, la gauche, est capable de marquer des points, en banlieue, sur la sécurité. Quant aux médias, égaux à eux-mêmes, ont-ils vérifié, disséqué, confronté, conforté leurs sources, informations, analyses ? Comme toujours, certains l’auront parfaitement fait en menant une enquête qui présente des conclusions allant à l’essentiel et qui saura être convaincante. Un travail solide, certainement prudent, le sujet le demande, tandis que d’autres auront vaguement gratté quelques miettes en leur possession pour les monter en épingle, en faire une information indigne de ce nom.
Ce genre d’histoire nous amène toujours à la conclusion, selon laquelle on redécouvre chaque fois, un pan de jeunesse qui bafouille sa vie, nombre de jeunes ne sachant pas ce qu’ils vont pouvoir faire de leur parcours, perdus qu’ils sont dans l’inaccessible du rêve, la brutalité de la réalité, le refus des valeurs qui ont construit l’homme depuis qu’il existe, le manque de vision qui permet de tracer une voie. Les institutions – la Police en est une – peuvent les aider. Seulement, quand un fragment de l’une d’entre elles dérape, le travail d’amont tremble. Tout n’est pas à recommencer, mais à consolider. Beaucoup de Théo pleurent. Ils savent que l’ascension n’est pas simple. Pour eux, le terrain manque de racines pour s’agripper.